Principal outil de communication humaine, la langue est également vectrice de traditions et de culture. Comme canal privilégié de la transmission de savoirs et de connaissances, la langue exprime ainsi une conception du monde, sous le prisme particulier de ses locuteurs. De ce fait, une partie de l’identité d’un peuple est caractérisée par sa langue. Par conséquent, même le rapport au monde et à l’environnement est codé par le langage : saviez-vous qu’il existe un lien étroit entre développement durable et préservation des langues autochtones ?
Des langues autochtones en voie de disparition
En premier lieu, rappelons quelques chiffres : on compte près de 6.700 langues parlées dans le monde dont 4.000 sont des langues autochtones. On nomme langue autochtone, toute langue qui existe depuis plusieurs générations, mais qui, sur un territoire donné, n’est plus parlée que par un groupe restreint de locuteurs. Ces langues sont donc en voie d’extinction. Il est estimé qu’une langue disparait toutes les deux semaines et qu’à ce rythme elles auront disparu avant la fin de ce siècle.
La sagesse écologique
Pour commencer, les langues participent au développement social, économique et politique des sociétés. Par conséquent, les langues autochtones représentent un véritable patrimoine immatériel. En effet, la parole est le meilleur outil de développement durable. Les cultures de tradition orale démontrent que les langues sont garantes de la transmission de l’Histoire, de savoirs, savoir-faire et savoir-être. Selon les Nations Unies, les langues autochtones sont aussi des « systèmes de connaissance vastes et complexes qui ont été développés au fil des millénaires ».
Par exemple, notre langue est truffée d’expressions et de dictons qui nous permettent de vivre en harmonie avec notre environnement. Le dicton français « bon temps en juin, abondance en grains ! », nous apprend que sous les climats tempérés d’Europe de l’Ouest, une météo favorable en juin présage une bonne moisson !
Les langues autochtones ont ainsi cette particularité d’être connectées à un contexte très spécifique qui décrit un environnement donné et les comportements liés à celui-ci. Seules ces langues peuvent exprimer ce contexte précis. Par des jeux de mots ou des métaphores, la langue décrit comment se comporte la nature et comment nous pouvons interagir avec elle. La langue peut aussi devenir indicateur de dérèglement. Les dictons permettent de prédire le climat. Lorsque de manière régulière les prévisions ne se vérifient plus, on observe le changement.
Des conséquences de l’extinction des langues sur la préservation des écosystèmes
Ainsi, en disparaissant, ces langues emporteraient avec elles une partie de nos connaissances sur notre planète, sur sa biodiversité. Les us et coutumes, préconisant la vie en harmonie avec l’environnement plutôt que sa destruction, seraient abandonnés. En quelques mots, la disparition des langues menace un bien essentiel : la sagesse écologique.
Laisserons-nous disparaître la biodiversité des langues ? Pour interpeller l’opinion face à cette crise linguistique majeure, l’Assemblée générale des Nations Unies a proclamé 2019 l’Année internationale des langues autochtones, afin de préserver, mettre en valeur et revitaliser les plus de 4.000 langues parlées par les peuples autochtones à travers la planète.
« Le tigre compte sur la forêt, la forêt compte sur le tigre ».
Ce vieux proverbe cambodgien rappelle que l’animal qu’est l’homo sapiens sapiens est dépendant de la nature et que la nature compte sur nous pour la protéger. La sagesse écologique transmise par la langue doit devenir une arme pour lutter contre le réchauffement climatique et la protection de l’environnement.
Tania Kusikumbaku
Pour aller + loin
Découvrez comment la préservation culturelle contribue à la défense de l’environnement dans un précédent article sur Youmanity.
Call to action
Quel est le proverbe, le dicton ou le slogan sur la nature ou l’environnement qui vous interpelle ? Partagez le avec nous!