Un tranché de l’Obs (21/12/2017).
Et si la coopération était tout aussi « naturelle » que la compétition? Pablo Servigne et Gauthier Chapelle démontrent avec brio comment l’entraide et la coopération font partie de la nature humaine…
Douze ans durant, Pablo Servigne et Gauthier Chapelle ont minutieusement étudié le vivant, adoptant une approche multidisciplinaire et croisant les regards sur les moteurs et mécanismes de survie des espèces animales, végétales et humaine. Les résultats de leurs recherches sont sans appel: l’entraide est omniprésente dans la nature!
« Ce ne sont pas forcément les plus forts qui survivent, mais ce sont les groupes les plus coopératifs. Ce sont les espèces et les individus qui s’associent, qui s’entraident, qui survivent le mieux aux conditions difficiles. »
Dans leur ouvrage « L’Entraide. L’autre loi de la jungle », les deux scientifiques s’attellent à déconstruire cette idée bien ancrée dans l’imaginaire occidental selon laquelle la nature est régie uniquement par la loi du plus fort. Or, si la compétition est bien présente dans la lutte pour la survie, les conditions hostiles du milieu provoquent pourtant entraide et coopération entre les individus. L’une ne se manifeste pas sans l’autre, compétition et coopération sont deux forces en tension, en équilibre.
Et l’homme dans tout ça? Animal social par définition, l’homme n’échappe pas à la loi de l’entraide. Des études sociologiques montrent qu’en situation de crise, aider son prochain est de l’ordre du réflexe, du spontané: la condition humaine prend le dessus. La culture de la compétition au fondement des sociétés occidentales est quant à elle le résultat d’une trajectoire historique, politique et idéologique qui a élevé la loi de la jungle au rang de loi universelle. Et s’il était temps de renverser la vapeur, de déconstruire le mythe?
Le saviez-vous?
Pins et sapins d’Amérique du Nord. De deux espèces différentes, ces arbres tendent à s’entraider lorsque les conditions du milieu sont plus difficiles: en altitude, les sapins se développent uniquement autour des pins, et se portent moins bien lorsque ceux-ci disparaissent.
Anémone de mer: « Jamais sans mon escargot! ». Certaines espèces ne peuvent plus se passer l’une de l’autre. C’est le cas d’une anémone de mer qui vit sur le dos d’un escargot, offrant protection à se dernier en échange du transport. Ces deux-là n’ont jamais été observés l’un sans l’autre, à tel point que l’escargot -fort de la protection de sa compagne l’anémone- se contente simplement d’une fine coquille.
« Oser se laisser transformer au contact de l’autre pour rester vivants, ensemble, il y a là une véritable leçon de lâcher-prise » (L’Entraide, p. 37).
Sources: nouvelobs.com, lalibre.be, imagine magazine